• Le conseil des ministres du 29 octobre a confirmé son intention de soumettre au vote des parlementaires « des dispositions… pour faciliter le développement industriel de DNCS d’une part, et de SNPE d’autre part ». Mr Zyss affirme toujours « qu’il n’y a rien de nouveau » ! Selon « La Tribune » du 3.11, il serait débarqué en deuxième semaine de novembre et remplacé par Mr Gendry.
D’où vient Herakles ?
• Derrière le projet du groupe SAFRAN de s’approprier SNPE, il y a une volonté de l’état plus ancienne de regrouper les activités stratégiques militaires, dans un premier temps, au sein du même groupe, sur un modèle privé et rentable.
• Septembre 2001, le ministre de la défense Alain Richard annonce la création pour début 2002, de Heraklès, qui sera filiale commune de SNECMA et SNPE.
• Dans ce cadre, en février 2002, sont crées coté SNECMA, la filiale SPS et coté SNPE, la filiale SME. La création d’Heraklès entérine l’arrêt de toutes les productions de l’établissement d’Angoulême.
• La sécurité auto a été constituée à partir du savoir faire SNPE sur les propergols. C’était une volonté de diversifier l’activité de l’établissement de st Médard pour qu’il ne repose pas seulement sur le stratégique. Chaque secteur pouvant s’épauler en cas de baisse de charge.
• Des 2000, la création d’Héraklès n’est annoncée que comme une 1ère étape vers un regroupement européen.
Le premier volet du projet actuel comporte une grande inconnue sur le devenir de nom¬breuses filiales ou entités du groupe mais aussi sur l’effectif des filiales « intéressantes » pour SAFRAN.
Silences et Grandes Manœuvres
Même si Mr Zyss ne veut rien dévoiler, des étapes vers la réalisation de ce projet ont été franchies, étapes qui font suite aux restructurations effectuées par Mr Zyss, dans la plus grande des cohérences. Le conseil des ministres du 29 octobre 2008 a entériné la soumission au vote des parlementaires d’une loi de privatisation de la SNPE qui est une société nationale détenue à 99 % par l’état. Ce vote pourrait avoir lieu en début d’année 2009.
La fusion avec SAFRAN deviendrait alors possible, ainsi que le second volet du projet, lourd de danger pour l’avenir de l’ensemble des salariés du groupe, ce deuxième volet prendrait la dimension d’un re-groupement européen dans lequel, de toute évidence, la production stratégique serait « partagée » à cette échelle. Parallèlement, le passage des chantiers navals (DCN) dans le privé est réalisé depuis mars 2007 avec 25 % du capital appartenant à Thalès.
La Privatisation en Marche
Lors de l’annonce de création d’Héraklès (2000), la première étape était constituée de deux sociétés na-tionales (SNPE et SNECMA). Aujourd’hui, ce n’est plus du tout le cas, dès le départ, il s’agit du rachat par une société privée (SAFRAN) et donc d’une privatisation immédiate. Pour ce faire le gouvernement doit transférer le monopole de nos fabrications du public au privé. La SNPE n’est pas une entreprise dont les fabrications sont de même nature que les autres industries :
• La SNPE a pour vocation d’assurer la défense du pays selon des règles non pas économiques, mais des décisions politiques prises par les élus de la population.
• La SNPE est une entreprise pyrotechnique où plus qu’ailleurs la sécurité doit-être la préoccupation numéro un tant pour protéger les salariés que la population.
Il y a 30 ou 40 ans de cela, aucune personne, quelque soit ses idées, n’aurait imaginé qu’un jour les productions visant à as-surer la défense du pays seraient remises entre les mains de financiers et d’industriels privés. Une société nationale comme la nôtre effectue une mission de service public, le seul et unique but d’une entreprise privée est de réaliser du profit.
Des Conséquences Néfastes
La privatisation n’est pas une décision anodine. Il s’agit d’abord de transférer un bien public, c'est-à-dire un bien qui a été financé par les impôts payés par la population, chacun d’entre nous, et qui appartient donc de fait à celle-ci, vers un groupe privé. Avec la privatisation, on quitte la logique de service public qui est de satisfaire les besoins (pour ce qui concerne la SNPE on parlera plutôt d’assurer la mission de défense décidé par les élus du pays), pour passer à la logique du profit financier avant tout.
Les actionnaires des entreprises privées demandent des résultats financiers, souvent immédiats, toujours à court terme, pour pouvoir empocher le pactole. L’actualité nous démontre tous les jours avec acuité les conséquences de cette logique là. Ils licencient dans des entreprises qui font pourtant des supers profits seulement pour pouvoir empocher des supers/supers profits. Il n’y en a jamais assez. Et les victimes, ce sont les travailleurs et la population. Les profits passent avant tout : avant l’emploi des salariés, on le voit tous les jours, et avant les nécessaires mesures de sécurité : le danger est bien réel !
Que feront les actionnaires s’il faut décider d’un investissement lourd et à long terme pour assurer la sécurité de la population et des personnels au risque d’écorcher leurs dividendes ? Lors de la catastrophe Toulousaine, c’est bien « les règles de sécurité d’une société nationale comme la SNPE » qui ont été mises en avant y compris par les dirigeants de SNPE… comparées « à celles qui exis-taient dans le privé, dont AZF » ! Et quelles décisions les actionnaires prendront-ils quand ils auront le choix entre leurs profits personnels ou la mission publique de l’entreprise ?
Pour la population, cela veut dire que la défense du pays et la production d’armement échappent au contrôle de l’état et des citoyens pour de¬venir le jouet financier des actionnaires et des patrons du privé.
Pour les salariés, du point de vue de l’emploi comme des conditions de travail et de la sécurité, les conséquences d’une privatisation sont lourdes de conséquences.
Plus de profit, cela suppose une économie maximum sur les effectifs et sur la quantité de travail réalisé par les salariés, ce qui est incompatible avec les meilleures conditions pour travailler en sécurité.
La Défense… Rentable ?
Etre privatisé, cela veut dire passer sous le contrôle de personnes qui n’ont d’autres buts que l’enrichissement et dont la dangerosité et l’inconscience sont malheureusement révélées tous les jours par l’actualité.
Plusieurs rapports de la cour des comptes ont encouragé le passage de SNPE et DCN dans le privé avec comme argumentaire « la nécessité économique face la concurrence » ! Comment peut-on défendre un tel point de vue quand on constate les fermetures d’usines qui se succèdent dans le privé avec les conséquences que l’on sait sur l’emploi ?
Un Regroupement…
SAFRAN est un groupe composé d’une trentaine de filiales rien que pour la France et de nombreuses autres partout dans le monde. Le groupe revendiquait 57 000 salariés au 30 juin 2008. Le groupe considère ses sites de productions comme des unités autonomes comportant chacune leurs accords d’entreprises.
La politique de la direction pour l’organisation du travail se reflète à travers la mise en place « d’horaires efficaces », ou les taches des salariés sont suivies par informatique, les salariés aussi d’ailleurs car ils doivent pointer d’un bâtiment à l’autre. Les « horaires efficaces » consistent en ce que chaque salarié peut être amené à se justifier sur la traçabilité de sa journée de travail de telle ou telle date. Ces dernières années, la direction de SAFRAN s’est distinguée par son attitude ferme et sa détermination face aux luttes des salariés sur les augmentations salariales.
… Au Goût de Démantèlement !
Que deviendraient les salariés SNPE noyés en unités autonomes dans un grand groupe comme SAFRAN ? Que deviendraient Bergerac NC (217 salariés) ? Eurenco (389) ? Isochem (344) ? Manuco (41) ? Pyroalliance (108) ? Durlin France (35) ? PB Clermont (Belgique 94 ) ? Même les parties de la SNPE comme SME, ROXEL, REGULUS ou STRUCTIL qui seraient convoitées par SA-FRAN risquent elles aussi des restructurations, qui sont des pratiques banales dans des groupes privés de cette envergure.
Que deviendraient en particulier le CEP ? Le CRB ? Toulouse ? St Hélène ? Et le site de St Médard n’est pas à l’abri non plus de « rentabilisation » par des suppres-sions de postes. Quand aux conditions dans lesquelles se feraient un rapprochement avec SPS, il serait illusoire de penser que SAFRAN envisage un rapprochement vers le haut.
Si nous changions de statut, tout peut être remis en question, la convention collective à laquelle nous appartenons, notre accord d’entreprise, nos conditions de travail, le temps de travail, horaires, notre protection santé etc…. Les cadres non plus ne sont pas à l’abri et des postes similaires pourraient être éliminés. Et n’oublions pas qu’Hérakles avait été « inauguré » par la décision… de fermer l’établissement d’Angoulême !
Pas Touche à la Sécurité Auto et au CRB !
On ne peut pas découper nos productions car elles sont étroitement liées industriellement comme financièrement. L’activité sécurité automobile a été créée par la recherche financée par l’activité défense (des actionnaires privés n’auraient pas écorchés leurs dividendes pour assurer cette diversification indispensable). Toutes les productions sont étroitement liées. Elles ont besoins les unes des autres pour assurer l’activité globale de l’établissement… et nos emplois. Elles sont des passerelles utilisées lors de baisse d’activité dans un secteur ou un autre.
Si elles n’existent plus, que se passera-t-il pour le personnel à chaque baisse de charge sur une activité ? Le CEP serait remis en cause et l’établissement démantelé alors qu’il a été crée pour diversifier l’activité du site et le pérenniser ? Pour toutes ces raisons il faut s’opposer ensemble et avec détermination à tout découpage de notre établissement ! Or, si aujourd’hui on ne sait pas ce qu’il adviendra immédiatement de la sécurité auto dans le projet, on sait que depuis le début SPS n’en veut pas, tout comme du CRB !
Une société privée voudra t’elle investir dans la recherche ? Ou bien tirer un maximum de l’existant et se séparer de la recherche qui ne lui rapporte rien dans un premier temps ? Rappelez-vous les paroles de Mr Béchat… Et, s’ils sont obligés de les reprendre au départ, ils risquent procéder ensuite au découpage, à la délocalisation, à la vente ou à la fermeture… La branche télécommunication de SAGEM en est un exemple !! Vigilance et lutte du personnel doivent s’opposer dès maintenant à toutes tentatives de ce genre.
Et en Finalité : Le Pôle Européen...
Mais Héraklès n’est qu’une étape. « Le Monde » du 1er novembre 2008 publiait une tribune libre cosignée Hervé Morin, (ministre de la défense) et Javier Solana, (chargé européen de la défense).
Voici quelques extraits :
« L’Europe de la défense, une priorité. Les 27 ministres européens de la défense ont dessiné, les 1ers et 2 octobre à Deauville, le nouvel horizon de l’Europe de la défense »… « C’est une construction pragmatique et fondée sur des projets concrets »…
« Cela impose de partager nos compétences, et non pour chacun des états de vouloir tout faire tout
seul. Alors que les budgets nationaux de défense sont de plus en plus contraints, nous devons gagner en efficacité et rationaliser les efforts comme les investissements financiers des européens. C’est aussi avec des programmes de recherche communs que nous favoriseront l’émergence d’une véritable base industrielle et technologique de défense en Europe. »…
« Dans le domaine industriel, nous soutenons la création d’un véritable marché intérieur de l’armement. Pour cela, la présidence française encourage l’adoption de nouvelles règles européennes facilitant le transfert des équipements de défense entre états membres et libéralisant davantage les marchés publics de défense »
...Et ses Dangers pour nos Sites
Les choses sont claires. Ces projets de « recentrage » autour de l’activité stratégique ont une finalité : un pôle stratégique européen. Les autres pays européens accepteraient-ils de laisser le monopole de la poudre, du nucléaire, et de la propulsion à la France ? S’il est peu probable que la production des tètes nucléaires échappe à la France, qu’adviendra-t-il du propergol ?
Dans cette logique de répartition de l’activité, que garderont la France et la SNPE ? Tout ? Avec l’arrivée d’AVIO, nous serons alors sur un regroupement d’entreprises avec des activités identiques. Partout, lorsqu’il y a concentration d’activités, partage du marché, « rationalisation », des salariés payent l’addition. Quel que soit le scénario d’un tel pôle, la seule certitude est que personne n’est à l’abri d’y perdre son emploi !
Agir pour éviter le pire !
Il est possible d’empêcher la privatisation de la SNPE qui est la clef de tous le processus. Même si Mr Zyss prétend s’opposer à Héraklès, son projet, dans la mesure où il n’était pas un leurre, passait également par la privatisation. De plus, alors qu’il est évident qu’il sait ce qui se prépare, il persiste dans un mutisme qui en dit long sur la confiance que les salariés peuvent lui porter.
Continuer à ne pas parler quand le conseil des ministres a déjà annoncé des me-sures dans un communiqué à la presse relève du délit d’entrave. Mr Zyss doit arrêter de dissimuler les informations qui nous concernent. C’est pour cela que SUD réclame la tenue d’un CCE qui nécessite une demande majoritaire des élus du groupe pour avoir lieu.
Ensuite, nous allons interpeller tous les élus locaux, responsables politiques nationaux pour qu’ils prennent position publiquement sur le projet avec ses risques liés aux pertes d’emploi et sur la privatisation. Nous allons leur demander de s’impliquer et d’avoir des démarches auprès du gouvernement et des parlementaires pour faire échec à la privatisation. Mais surtout, pour se faire voir et se faire entendre, l’action la plus efficace sera la mobilisation de tous pour préserver notre emploi et nos conditions de travail.
Sur St Médard, dans un passé récent, nous avons pu obtenir le retrait total des licenciements par le premier ministre de l’époque… par notre mobilisation dans l’entreprise… et dans la rue ! Il faut se préparer à manifester et à faire grève car seule notre mobilisation pourra donner un poids à toutes les actions qui seront engagées pour enrayer le processus destructeur qui est en cours.
SUD SNPE, Le 12 novembre 2008